Moshé Feldenkraïs (1904-1984) est né en Russie. A l'âge de 14 ans, il part à pied s'installer en Palestine et y travaille comme maçon pour gagner sa vie.

C'est à un peu plus de vingt ans, en jouant au football, qu'il se blesse grièvement au genou gauche, blessure qui l'empêche de marcher normalement pendant plusieurs mois. C'est le point de départ du développement de sa méthode. Il écrit bien plus tard, dans « L'évidence en question » :

"A cette époque la chirurgie du genou ne permettait pas une intervention aussi simple qu'elle l'est aujourd'hui. C'est le fait d'apprendre à fonctionner avec mon genou dans l'état où il était qui m'a permis de comprendre qu'il fallait faire quelque chose de plus."

A 23 ans, il s'inscrit à l'université pour étudier les mathématiques. Parallèlement à son cursus universitaire, il s'intéresse à la psychologie, à l'éducation, et au jiu-jitsu, qu'il pratique avec passion. Il l'enseigne d'ailleurs avant d'en faire le sujet de son premier livre « Jiu-jitsu et self défense ».

Très doué pour les mathématiques, il est envoyé à Paris pour poursuivre des études d'ingénieur en mécanique et en électricité puis un doctorat de physique à la Sorbonne. Docteur ès sciences, il travaille dans le laboratoire de F. Joliot-Curie. A cette époque, dans les années 1930, il fait la connaissance de maître Kano, fondateur du judo. Cette rencontre est déterminante pour lui. Il devient une des premières ceintures noires européennes et participe à la création du premier Judo Club de France.

Judo au sol par Kawaishi et Feldenkraïs

Judo au sol par Kawaishi et Feldenkraïs

En 1940, il part en Angleterre pour fuir les nazis, et il travaille en tant qu'officier dans les services scientifiques et techniques britanniques de lutte anti sous-marine. Il développe parallèlement sa méthode sur le comportement humain qu'il observe et « apprend à connaître » par le toucher. Avec un esprit ouvert, clair, curieux, scientifique, il effectue des recherches dans tous les domaines qui peuvent l'aider à l'époque.

C'est un chercheur infatigable. Il va  explorer le domaine de la science, en particulier la théorie de l'évolution, ainsi que les méthodes mettant l'accent sur le rétablissement de nos fonctions mentales telles que l'autosuggestion (il traduit et préface « La méthode Coué »), l'hypnose, la psychanalyse... ou sur l'entraînement direct du corps comme le yoga... (et les méthodes de relaxation qui en sont issues), les méthodes de respiration, celles encore de certaines écoles de danse. Il rentre ensuite en Israël où il devient premier directeur du département d'électronique des forces de défense israéliennes.

En 1949 il publie « L'Être et la maturité du comportement, Une étude sur l'anxiété, le sexe, la gravitation et l'apprentissage ». Ce livre témoigne de ses découvertes, en particulier il observe que les traitements des problèmes de comportement et leurs désordres se heurtent au « conscient » comme obstacle, que la distinction entre vie physique et vie psychique est arbitraire. Il s'intéresse à distinguer ce qui est inné et découle de l'évolution de l'espèce humaine, de ce qui est acquis et découle de l'adaptation à l'environnement, nos habitudes. Il décrit qu'il est toujours possible de redémarrer notre apprentissage, et continuer à développer notre potentiel quel que soit notre vécu.

Photo: Michael Wolgensinger

Photo: Michael Wolgensinger

Jusqu'à sa mort, il continue d'élaborer et d'enseigner sa méthode qu'il fait connaître partout dans le monde, et tout spécialement en Europe et aux Etats-Unis. Aujourd'hui, elle est enseignée selon un processus de quatre années, au cours duquel les élèves enseignants explorent sur eux-mêmes, entre eux, puis avec du public, les processus mis en « leçons collectives » ou en séances individuelles. Ils acquièrent ainsi une connaissance vécue, « incorporée » de ces processus et des schémas de mouvements qu'ils aideront leurs élèves à (re)découvrir ensuite.